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07 Nov

Interview - Prix Découverte MINES NOIRES : Christophe Dubourg est-il le Grand Méchant Loup (normand) ?

Publié par Benedict Mitchell  - Catégories :  #LES MINES NOIRES

Interview - Prix Découverte MINES NOIRES : Christophe Dubourg est-il le Grand Méchant Loup (normand) ?

Bonjour Christophe,

Bienvenue à toi.

 

Bonjour Bénédicte ! Ravi de passer sous le feu nourri de tes questions ! :-)

 

 

Alors dis-nous qui tu es ?

 

J'ai 49 ans et je suis normand d'origine. Après avoir passé 5 années dans le Sud, j'habite à présent non loin de Caen dans le Calvados, avec ma femme et mes 2 enfants.

 

 

Pourquoi l'écriture ?

 

C'est venu assez naturellement en fait. J'étais à la base un grand lecteur doublé d'un grand cinéphile. « J'étais », oui, parce que j'ai peu à peu revu mes prétentions à la baisse avec l'écriture qui, entre recherches et construction, prend un temps fou !

On peut dire que je suis tombé dedans quand j'étais petit. J'ai commencé avec la bibliothèque rose mais surtout verte et la collection rouge & or (Langelot, les 6 compagnons, Michel, les frères Hardy etc...) puis enchaîné ado avec les Jules Verne, Agatha Christie, Gaston Leroux, John Buchan (écrivain à mon sens trop mésestimé, auteur entre autres de « Les 39 marches » adapté par Hitchcock), S.A. Steeman (L'assassin habite au 21...) Pour les films, j'aime aussi bien ceux des années, 30, 40, 50, 60, 70, 80 que les plus récents. Un éventail trèèèèès large, donc !

J'ai également eu ma grosse période jeux de rôle à la fin des années 80 (L'appel de Cthulhu, Donjons et dragons...), des jeux développant l'imagination et qui « valorisaient » un certain background littéraire. Des jeux dans lesquels je préférais toujours tenir le rôle de « Maître du jeu » plutôt que celui de PJ (Personnage Joueur), le héros à incarner dans l'aventure. Cependant, si se baser sur des histoires pré-existantes pour conduire le récit ou en inventer de nouvelles pour ce type de jeu me plaisait, le côté « éphémère » de la chose me gênait. Bref, il me manquait quelque chose pour être pleinement satisfait. D'où l'écriture qui est arrivée comme une évidence. Quoi de mieux que d'écrire et d'inventer son histoire rêvée ? C'est véritablement ainsi que tout a commencé. Je me suis mis à écrire au milieu des années 90... même si je n'ai que très récemment franchi le cap d'envoi de manuscrits !

 

 

Pourquoi le thriller ?

 

En raison de mes lectures j'imagine... Mes films et romans favoris sont des thrillers. Mes goûts personnels tendent vers ce genre là.

Le polar est un genre qui autorise toutes les fantaisies, qui permet aussi de parler de la « vie » sous couvert de divertissement. Je revendique diverses influences, d'Alfred Hitchcock, William Friedkin aux premiers Guy Ritchie pour le cinéma en passant par Maurice Leblanc, Sax Rohmer (Fu Manchu), Michaël Connely, Serge Brussolo (dont la production littéraire est ahurissante), Christian Roux, Gilles Vincent, Dominique Forma... et beaucoup beaucoup d'autres...

 

 

Les loups et l'agneau est ton premier roman. Comment t'est-il venu ?

 

D'une manière plutôt particulière. J'avais écris en 2005 un pavé largement imbuvable (donc indigeste) de 800 pages, un roman d'espionnage / action / aventure non maîtrisé qui partait dans toutes les directions... mais surtout droit dans le mur ! En lisant la « chose », ma femme m'avait très justement fait remarquer le fait que je pouvais facilement y puiser trois ou quatre histoires indépendantes. On y trouvait notamment quelques chapitres d'une fillette enfermée dans un réduit ainsi qu'un personnage de brute épaisse, Borg, qui n'interagissait pas avec elle. Ces deux individus, l'idée du réduit, de l'isolement, sont ainsi extraits de l'ADN du pavé. Et puis... une seconde raison pour Les loups et l'agneau : La nouvelle : Blind Test, rédigée il y a un bail, une histoire de captivité, un « captivity thriller » comme disent les américains. Je n'aime pourtant pas spécialement me répéter, j'étais assez satisfait de la nouvelle mais j'avais aussi envie de me replonger dans ce type d'histoire. Je sentais que je pouvais développer l'idée d'enfermement sur un nombre de pages plus conséquent mais surtout le faire d'une manière plus viscérale. Apporter d'autres éléments en plus du côté introspectif de la nouvelle. Développer, exploiter davantage cette notion d'isolement avec plusieurs individus. Les loups et l'agneau découle donc de ces deux raisons.

 


 

Certains s'en souviendront peut-être mais tu as remporté la seconde place du concours de nouvelles des Mines Noires lors de la dernière édition pour Blind Test. Il y était question de ténèbres aussi... d'où ma question : la peur du noir est-elle un thème de prédilection chez toi ? Ça ramène à l'enfance avec les princesses & les ogres... une Madeleine de Proust ou un traumatisme ?

 

Non... enfin, je ne crois pas me rappeler avoir vécu ce genre de trauma ! Là encore, j'imagine que ça provient davantage des films ingurgités depuis l'adolescence. Je suis en quelque sorte la somme de mes références. Je n'invente rien, je crois même que plus personne n'invente rien mais ne fait que recycler... Seul le regard de l'auteur fait la différence. Quant au noir et à la peur induite par les ténèbres, c'est quand même un formidable ressort dramatique, un super terrain de jeu et d'expérimentations !

 

 

Bon, on peut le dire, dans ton roman tu te fais bien plaisir à pourrir un peu nos rêves de gosses. En particulier le Père Noël. Mais pourquoi tant de haine ? Tous les Pères Noëls de grandes surfaces sont-ils forcément des détraqués échappés d'un sketch des Inconnus ?

 

J'espère bien que non ! Mais un Père Noël, c'est un peu comme un clown... Ces deux-là sont à priori gentils avec les enfants. Il y a un côté rigolo chez le clown, une bonhomie et une bienveillance chez Santa Claus... Mais il y a aussi un côté transgressif, pervers et jouissif à transformer des symboles enfantins en éléments monstrueux ! Et ce n'est pas nouveau. Il y a les romans (évidemment le Ça du King par exemple) mais aussi les films. D'ailleurs, l'un d'eux (un slasher très mauvais) a pour « héros » un père noël tueur... Il y a aussi 3615 code Père Noël de René Manzor qui jouait aussi là-dessus, la peur enfantine avec un personnage à priori positif... Consciemment ou non, ces références là remontent à la surface. Tu vois, quand je parlais de recyclage, c'est exactement ça.

 

 

Les loups et l'agneau, c'est une réécriture improbable d'une célèbre fable de La Fontaine, pourrait-on dire. Est-ce un moyen détourné de démontrer que les hommes sont des prédateurs ? Il n'y en a pas un pour rattraper l'autre ? Est-ce à celui qui sera, au final, le moins pourri d'entre tous ?

 

Oui, il y a un peu de ça. Je suis de nature assez pessimiste concernant la nature humaine. Et le héros « tout blanc » - même si je l'apprécie au cinéma - m'irrite davantage en littérature. Parce que personne n'est comme ça dans la « vraie » vie. L'individu a toujours une part d'ombre. De la même manière qu'on navigue tous un jour ou l'autre dans le gris de l'existence. La vie n'est pas un long fleuve tranquille. Entendons-nous bien, je ne dédaigne pas lire des romans mettant en scène ce type de personnages – sans peur et sans reproches - mais je n'apprécie pas forcément d'écrire sur eux. J'ai essayé de trouver un ancrage réel, sinon possible ou du moins plausible, et qui refléterait une certaine réalité de l'existence. Ce qui nous renvoie aux années 70, période où les personnages étaient bien moins manichéens, moins unidimensionnels qu'aujourd'hui. Ils possédaient des failles, des fêlures. N'étaient pas des héros ou même des super-héros mais des gens plus ou moins ordinaires qui vivaient des aventures restant dans le domaine du possible, sans surenchères ou exagérations. La même chose pour les retournements de situations improbables : j'aime lire ce genre de romans mais je me dis toujours que c'est impossible. Dans la « vraie » vie, ça n'arriverait jamais. Alors pour répondre à la question, oui, mes personnages sont pourris (enfin, pas tous hein !) mais surtout tourmentés. Et puis je pense qu'il est bien plus intéressant de parler des anti-héros que des super-héros. Les anti-héros sont un peu des dommages collatéraux créés par la société...

 

 

Y a-t-il d'autres genres littéraires que tu aimerais explorer côté écriture ou alors tu souhaites rester dans le 100% noir ?

 

Je ne m'interdis rien mais le noir me va très bien. Pour autant, plus je vieillis et plus le coloré m'attire ! Pour ça que j'aime le polar. Parce qu'il est diversifié, peut s'écrire fantaisiste ou réaliste. Je me sens à l'aise dans différentes formes de polars. On peut très bien aimer Nadine Monfils et Gilles Vincent, Stanislas Petrosky et Jo Nesbo. Et puis surtout, je ne me sens pas prêt à aller dans d'autres directions. Parce qu'honnêtement, je ne saurais pas faire. Pas encore du moins.

 

 

As-tu des projets, cher Christophe ? Si oui, tu veux bien nous en dire plus ?

 

Le fait que la nouvelle Blind Test ait été primée à Noeux-les-mines a été déterminant. C'est aussi grâce à toi, je t'en remercie infiniment et ça t'a permis d'éviter de mourir dans d'atroces souffrances ! Et plus sérieusement, être édité par une « vraie » maison d'édition a boosté ma libido littéraire... Parce que j'avais vraiment besoin de me sentir légitime par rapport à l'écriture. Le regard des proches, même s'il est bienveillant, n'est pas suffisant pour se sentir « rassuré » quant à ses écrits. Être publié par une maison d'édition m'a en quelque sorte libéré... délivré !

Pour répondre à ta question sur les projets, l'un est déjà écrit, parti en relecture chez une seconde maison d'édition... euh... disons qu'il est en Stand by-Work in progress-mais j'espère très fort qu'il se réalisera (!), l'autre est en cours d'écriture, toujours chez Ravet-Anceau. Le « déjà écrit » est plus fantaisiste, n'a pratiquement rien à voir avec Les loups et l'agneau, ni dans l'histoire, ni dans le style d'écriture. Si. Un point commun : ça reste du polar. Quant au prochain Polars En Nord, il se déroulera dans le même univers que Les loups, celui des années 80 donc... wait and see...

 

 

Et pour mieux te connaître, quel lecteur es-tu ?

 

Ado, je lisais plusieurs genres différents, du roman d'aventures, de la science-fiction, du fantastique, du Stephen King (un genre à lui tout seul)... mais j'ai beaucoup de mal à lire autre chose que du polar ou du thriller dorénavant. Par envies, goûts personnels...

Et si j'aime toujours autant les indémodables Agatha Christie et Jules Verne, j'y ajouterai certains auteurs - récents et vivants - comme Dennis Lehane, Olivier Norek, Frank Thilliez, Jean-Luc Bizien, Jean-Hugues Oppel, Jacques Saussey, Armelle Carbonel, Gilles Vincent, Frédéric Ernotte, Claire Favan, Stanislas Petrosky (jalousé par Van Damme en raison de ses grands écarts littéraires)... J'aime réellement beaucoup d'auteurs et d'univers différents. Du noir abyssal au comique débridé. Et je souhaiterais aussi en découvrir d'autres... Nicolas Lebel, Ivan Zinberg, Paul Colize...

 

 

Tes passions dans la vie (autre que l'écriture) ?

 

Famille, amis, cinéma... rien que du très « basique », mais de l'essentiel.

 

 

Qui t'inspire ?

 

Les auteurs du noir et les films me nourrissent. Actuellement, La criminologie pour les nuls m'inspire aussi beaucoup !

 

 

Et pour finir, ta Madeleine de Proust à toi, ce serait quoi ?

 

Une certaine insouciance propre aux années 80, qui correspondent à mon adolescence. Le funk et la pop, les productions Amblin, les films de John Hughes, les premiers Verhoeven, une liberté de ton qui a tendance à disparaître aujourd'hui... Oui, j'avoue avoir un peu la nostalgie des eighties. Un fort pouvoir évocateur, pleins de souvenirs joyeux... c'est du moins de cette manière (certainement faussée) que je me représente ces années-là avec 30 ans de recul. D'ailleurs, si tu connais quelqu'un qui possède la DeLorean de Doc et Marty, ça m'intéresse !

 

 

Enfin, tradition oblige, tu as carte blanche pour faire passer un message de ton choix (cri d'amour ou coup de gueule, c'est comme tu veux) :

 

Un cri d'amour !

Je vis un rêve éveillé depuis le début d'année 2017. Sans les éditeurs, les auteurs, les bloggeurs, les organisateurs de salon, rien de possible pour cette mise en lumière. Un grand merci à eux.

Sans toi qui a sélectionné Blind Test pour le concours de nouvelles 2017, je n'aurais fait aucune des rencontres qui illuminent mon quotidien depuis 9 mois.

Un énorme MERCI perso à TOI Bénédicte, pour Blind Test donc, et pour avoir sélectionné Les loups et l'agneau pour le prix de la découverte 2018 !!! Je t'en suis infiniment reconnaissant. Je te sais investie à fond dans cette passion commune, dévorante et n'ignore rien des sacrifices qu'elle représente.

 

P.S : Tu as tout à fait raison de te sentir dans la peau de l'entraîneur qui se réjouit pour son poulain méritant ! (Cf ta chronique) Je suis hyper fier et heureux de ne pas t'avoir déçu !

 

Merci à toi d'avoir accepté d'éclairer notre lanterne !

On te souhaite bonne chance pour le Prix !

 

Merciiiiiiiiii !!!

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Chers aventuriers égarés, bienvenus dans mon royaume souterrain où le Chaos, les Ténèbres et la Folie sont les seuls maîtres à bord ...