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15 Jun

" REVER ", de Franck Thilliez (2016)

Publié par Benedict Mitchell  - Catégories :  #Alcôves

" REVER ", de Franck Thilliez (2016)

Un nouveau livre de Franck Thilliez, c'est désormais un événement. Une publication annuelle, autant vous dire qu'elle est toujours très attendue. Et quand l'auteur nous fait saliver avec un one shot - c'est-à-dire qu'il délaisse son célèbre duo d'enquêteurs Franck Sharko/Lucie Hennebelle - les lecteurs répondent présents. Parce que l'auteur figure parmi les plus doués de sa génération et qu'il sait fichtrement bien allier suspens & thèmes sciencifiques.

Dans REVER (qu'on peut lire dans les deux sens, hé ! hé ! ), le sujet évoqué est celui des rêves. Après la sortie du Sixième Sommeil de Bernard Werber il y a quelques mois, on pouvait craindre des ressemblances, les deux auteurs faisant partie de la Ligue de l'Imaginaire... On peut être rassuré : rien à voir dans les deux romans.

Résultat : un pavé de près de 600 pages avec des bonus bien sympas à la clé (à télécharger). Par contre, prenez des notes, parce que pour débloquer le fameux chapitre supplémentaire, vous avez intérêt à avoir une bonne mémoire (en particulier des chiffres !).

-> " Pour la plupart des gens, le rêve s'arrête au réveil.

Si ce n'étaient ses cicatrices et les photos étranges qui tapissent les murs de son bureau, on pourrait dire d'Abigaël qu'elle est une femme comme les autres.

Si ce n'étaient ces moments où elle chute au pays des rêves, on pourrait jurer qu'Abigaël dit vrai.

Abigaël a beau être cette psychologue qu'on s'arrache sur les affaires criminelles difficiles, sa maladie survient toujours comme une invitée non désirée. Une narcolepsie sévère qui la coupe du monde plusieurs fois par jour et l'emmène dans une dimension où le rêve empiète sur la réalité. Pour les distinguer l'un de l'autre, elle n'a pas trouvé mieux que la douleur.

Comment Abigaël est-elle sortie indemne de l'accident qui lui a ravi son père et sa fille ? Par quel miracle a-t-on pu la retrouver à côté de la voiture, véritable confetti de tôle, le visage à peine touché par quelques bris de verre ? Quel secret cachait son père qui tenait tant, ce matin de décembre, à s'exiler pour deux jours en famille ? Elle qui suait sang et eau sur une affaire de disparition depuis quelques mois va devoir mener l'enquête la plus cruciale de sa vie. Dans cette enquête, il y a une proie et un prédateur : elle-même. "

-> La nuit est pleine de terreurs...

Abigaël n'est pas une psychiatre comme les autres. Atteinte de narcolepsie et de catatonie depuis sa plus tendre enfance, elle perd, peu à peu, pied, à cause de son traitement. Puissant, il lui fait de plus en plus oublier ses souvenirs. À tel point que ses pires cauchemars s'avèrent bien souvent bien plus réalistes que la réalité... Pour couronner le tout, Abigaël et les gendarmes (avec qui elle bosse depuis des mois sur une affaire de gamins kidnappés) piétinent complètement. Et le malheur semble avoir choisi sa famille pour se fixer et bâtir son nid : un soir de Décembre où sa vie a basculé suite à un accident de voiture... miraculée, dévastée, la psy suffoque de plus en plus face aux visions et cauchemars qui l'handicapent quotidiennement. La souffrance finit par devenir sa seule bouée de sauvetage, mais pour encore combien de temps ? Car voilà, le ravisseur d'enfant, tristement surnommé Freddy en hommage au croquemitaine des films d'horreur éponymes, ne semble pas décidé à se faire démasquer. Bien au contraire, quelque chose le lie à Abigaël mais quoi ? Comment discerner la vérité du monde des songes ? Surtout quand la moindre crise peut vous terrasser à n'importe quel moment, vous rendant vulnérable. Complètement.

La psychiatre décide de mener l'enquête. À mesure qu'elle débusque des pistes, de plus en plus incertaines et inconcevables, l'étau se referme sur elle. Dans quel nid de guêpes est-elle allée se fourrer ?

Pour le savoir, il vous faudra plonger dans le pays des rêves d'Abigaël... pas sûr que ce voyage se déroule tranquillement.

Le Croquemitaine...

Le Croquemitaine...

-> Aux frontières et au-delà du réel ?

S'il y a une chose sur laquelle tous les lecteurs de REVER sont unanimes, c'est que ce roman diffère de ses prédécesseurs, sur bien des points.

En premier lieu, sa forme, son fil chronologique. Ne vous attendez pas à une narration linéaire. Le livre se situe entre deux points chronologiques, et régulièrement (pas à tous les chapitres pour autant), l'auteur va opérer des sauts de puce, aussi bien en avant qu'en arrière. Pour ne pas vous perdre, il a pensé à vous laisser une boussole (une frise chronologique avec un curseur), histoire de pouvoir se situer dans l'histoire. Oui, ça marche malgré tout, même si par moment il faut faire un effort pour se remémorer et se resituer dans l'axe narratif.

Ensuite, quand à la forme, rien à redire ! C'est du grand Thilliez, une écriture juste, sombre, parfois poétique, violente. Une grande maîtrise. Incontestablement, c'est le meilleur livre qu'il a écrit (et je ne parle pas d'histoire racontée, juste de la forme).

Les thèmes choisis restent novateurs dans sa bibliographie. J'avoue que pendant les 3/4 du roman j'ai eu peur. Peur de revivre un Puzzle bis, ou un autre Double Je. Non, Franck Thilliez a su, une fois encore, se renouveler. Et innover. La plongée dans l'enfer que vit l'héroïne est saisissante. On mesure que les gens souffrant de narcolepsie vivent un véritable calvaire, de même que ceux qui doivent pâtir de troubles du sommeil (et je suis bien placée pour le savoir...). Quand Bernard Werber avait une conception plutôt fantaisiste du sommeil (et très connotée science-fiction), Franck Thilliez aborde ce thème scientifiquement. On parvient, de ce fait, à mieux s'identifier à l'héroïne, ou tout du moins, à essayer. Parce que voilà, Abigaël m'a laissé une impression mitigée que je ne sais pas expliquer. De même que la construction du récit, c'est-à-dire complètement décousue chronologiquement (même si dans les bonus, l'auteur propose un chapitrage chronologique pour vivre REVER différemment), me laisse perplexe. Peut-être cela tient-il au fait que j'ai lu ce livre alors que je vivais un épisode de fatigue intense, qui a fait que comme l'héroïne, je m'endormais en pleine lecture... en somme, juste un problème de timing ? Parce que les 100 dernières pages m'ont complètement tenu en haleine ! Cependant, des questions demeurent sans réponses. Il me faudra sans doute relire ce livre en tenant compte, cette fois ci, de la véritable chronologie... Gggggrrrrr !!!

J'avoue qu'on se laisse prendre au jeu, lorsque les rêves (ou plutôt les cauchemars) de l'héroïne prennent le dessus. Thilliez joue avec le lecteur, avec ses nerfs surtout. À chaque fois on se fait avoir. Et on ne retient pas la leçon. Bravo quand même pour m'avoir fait développer une certaine théorie, qui finalement s'avère complètement ridicule lorsqu'on a terminé sa lecture. C'est brillant, diabolique, malin, intelligent, pervers, sadique, et on en redemande.

Par contre, j'ai entendu et lu beaucoup de mots dithyrambiques pour qualifier ce livre, comme "merveilleux", "chef-d'œuvre" etc... "le meilleur Thilliez de tous les temps". Alors oui, même si à chacune de ses publications on est d'accord pour dire qu'il s'est surpassé par rapport aux précédents livres, bah non, désolée. Pour moi ça n'est pas son meilleur livre. Il reste encore à venir (à écrire). J'ai de très loin préféré Puzzle et le cycle Sharko/Hennebelle qui va du Syndrome E à Pandemia. Je ne sais point l'expliquer, pourtant le domaine des rêves est passionnant ! Mais voilà, le dénouement m'a certainement déçu. Vous dire en quoi je ne le peux. Mais sans doute qu'il y a une part de "trop classique/convenu" à mon goût dans ce dernier.

Homme-renard... vous comprenez pas ? C'est pas grave... lisez, et vous comprendrez !

Homme-renard... vous comprenez pas ? C'est pas grave... lisez, et vous comprendrez !

< EXTRAITS >

" Pour la plupart des gens, le rêve s'arrête au réveil. Mais pour moi, distinguer le rêve de la réalité est devenu chaque jour plus compliqué. Car ces derniers temps, même éveillée, je dois sans cesse m'assurer que je ne rêve pas. Être bien certaine que, ce que mes yeux voient, ce que mes oreilles entendent EST la réalité. "

(...)

" La pluie se fracassait sur la grande verrière au-dessus de leur tête, comme un pare-brise explosant contre un arbre. Le vent crachait ses poumons. Par une fenêtre grillagée, Abigaël ne distingua que les pulsations d'un phare lointain - un œil de cyclone dans les ténèbres. À 16 heures, on avait l'impression qu'il faisait déjà nuit. Ils passèrent devant des portes fermées et percées de petites fenêtres rectangulaires. Un homme se tapait le front contre l'une d'elles, sans se faire vraiment mal mais avec assez de force pour que le bruit résonne dans tout le couloir, au rythme de leurs pas. La folie suintait, visqueuse, dégoulinante, comme une vérole prête à contaminer toute forme de vie. "

(...)

" De toutes les ténèbres, celles qui étouffent mon âme sont de loin les plus sombres. "

(...)

" Le soleil avait commencé à décliner et disparaissait juste derrière la cime des arbres. Les ombres dévalaient, larges et froides, comme des croquemitaines géants. "

Franck Thilliez

Franck Thilliez

MA NOTE : 4.75 / 5

-> Un thriller perturbant et oppressant qui vous plongera dans la folie de l'esprit humain (au pluriel, "esprit humain" j'entends...)

REVER est clairement un bon livre, je ne le nie absolument pas. Toutefois, il ne m'a pas happé comme ceux d'avant. Je l'ai trouvé fastidieux à lire et inutilement compliqué à construire pour l'auteur, quant au fait de proposer une chronologie décousue. Sans doute cela fait-il partie du plan pour perdre le lecteur et faire en sorte qu'au final, il lui reste des pièces de puzzle qu'il doit reconstituer pour y voir clair, tout comme Abigaël dont la mémoire et la perception du réel flanchent de plus en plus. Par ailleurs, j'ai au moins une question qui reste dans réponse après ma lecture (et elle concerne les motivations d'un personnage secondaire, accessoirement auteur de polar...).

L'explication finale m'a un peu déçu par son côté " tout ça pour ça ? ", moi qui m'attendait à quelque chose de bien plus retors ou machiavélique. Quelque part, tant mieux, tout cet imbroglio chronologique et ce chaos trouvent une explication logique, et plausible. C'est sûr, je l'ai pas vu venir le dénouement ! Ha ! Ha ! Ha !

En tout cas, cette lecture ne fait que confirmer une certitude me concernant : je sature des polars & thrillers avec toujours ces mêmes tarés frustrés & autres malades qui commettent des horreurs inqualifiables. C'est sans doute à cause de cela que je n'ai pu, sans doute, apprécier à sa juste valeur cette lecture que j'attendais pourtant avec impatience. Ce sont des choses qui arrivent... et je suis vraiment dégoûtée que ce soit tombé sur mon auteur de polar français préféré !!!

En somme c'est encore un très bon livre que nous a pondu Franck Thilliez. Avec pas mal de références aux peurs qui nous terrorisent depuis l'enfance, et un regard très poussé et pointu sur une maladie trop méconnue, la narcolepsie. Cependant, une œuvre un peu moins sanglante que ce à quoi nous avait habitué Monsieur Thilliez (pour une fois ^^).

C'est du grand Thilliez, oui, pas de douta là-dessus, mais je n'ai pas été sensible à tout. J'apprécie l'innovation narrative bien que l'héroïne ne m'ait pas trop emballé. J'ai globalement appréciée d'être prise pour un pantin par l'auteur (oui, une lectrice masochiste sans doute je suis...), d'être complètement manipulée, baladée. Au moins je n'ai pas deviné l'épilogue. Ouf !

J'attends donc le prochain avec impatience... en espérant que d'ici là, ma dépression polar/thriller sera guérie !

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J
Bonjour, j'ai adoré le livre, j'ai une question: qui tue freddy à la fin ? Parce que frédéric est censé être déjà mort ?
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B
Bonsoir. Euh... je l'ai lu il y a longtemps... C'est qui Freddy déjà ? LOL

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Chers aventuriers égarés, bienvenus dans mon royaume souterrain où le Chaos, les Ténèbres et la Folie sont les seuls maîtres à bord ...